Résumé analytique
La constitution prévoit la liberté de pensée et d’expression religieuse et interdit la discrimination religieuse sur le lieu de travail. D’autres lois protègent les croyances religieuses individuelles contre les abus du gouvernement ou des acteurs privés.
Les musulmans nés dans le pays ont continué à signaler que, malgré des générations de résidence, certains membres de leur communauté n’ont pas pu acquérir la citoyenneté. Les responsables musulmans ont à nouveau signalé que certains d’entre eux continuaient à rencontrer des difficultés pour obtenir des documents officiels et des services de la part des administrations publiques en raison de leurs noms à consonance non malgache. Des membres de la communauté musulmane ou de groupes évangéliques ont dénoncé l’interférence politique de dirigeants élus et de responsables gouvernementaux haut placés dans leurs affaires internes.
Les membres de certaines églises protestantes évangéliques ont continué à signaler qu’ils étaient victimes de discrimination dans les pratiques d’emploi en raison de leur affiliation religieuse, en particulier ceux qui observent le sabbat du samedi. D’autres membres ont signalé une discrimination et du mépris de la part de leurs familles ou à l’école.
Les représentants de l’ambassade des États-Unis se sont entretenus avec les fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur chargés de l’enregistrement des groupes religieux. Les représentants de l’ambassade ont également discuté des questions relatives à la citoyenneté des Musulmans avec les organisations de droits humains et les organisations internationales. Au cours de l’année, les responsables de l’ambassade se sont entretenus avec les chefs religieux sur la liberté religieuse et la cohabitation inter religieuses dans les régions.
Section I. Démographie religieuse
Le gouvernement américain estime la population totale à 28,2 millions d’habitants (milieu de l’année 2022). Selon les données du Pew Research Center pour 2021, 85,3 % de la population est chrétienne, 3 % est musulmane, 4,5 % adhère à des croyances traditionnelles et 6,9 % n’a aucune affiliation. Il est courant d’alterner entre les identités religieuses ou de mélanger les traditions, et de nombreux individus ont une combinaison de croyances indigènes et chrétiennes ou musulmanes.
Les dirigeants musulmans et certains universitaires locaux estiment que les musulmans représentent entre 15 et 25 % de la population. Les musulmans prédominent dans les zones côtières du nord-ouest et du sud-est, et les chrétiens dans les hautes terres. Selon les chefs religieux musulmans locaux et les universitaires laïques, la majorité des musulmans sont sunnites. Il y a une communauté plus restreinte de musulmans chiites d’environ 300 personnes dans la région de la côte nord-ouest. Les citoyens d’origine indienne et pakistanaise et les immigrants comoriens constituent une part importante de la communauté musulmane en dépit d’une récente augmentation des convertis à l’islam d’origine malgache.
Les groupes religieux locaux déclarent que 70 % de la population est chrétienne et se répartit comme suit : Catholiques romains (34 % de la population), Église presbytérienne de Jésus-Christ à Madagascar (Église FJKM, 18 %), luthériens (14 %) et anglicans (4,5 %). Les plus petits groupes chrétiens comprennent l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, les Témoins de Jéhovah, les Adventistes du Septième Jour, l’Église orthodoxe orientale et un nombre croissant de dénominations protestantes évangéliques locales.
Il y a un petit nombre d’hindous et de juifs.
Section II. Statut du respect de la liberté de religion par le Gouvernement
Cadre juridique
La constitution prévoit la liberté de pensée et d’expression religieuse et interdit la discrimination religieuse sur le lieu de travail. D’autres lois protègent les croyances religieuses individuelles contre les abus du gouvernement ou des acteurs privés. La constitution stipule que ces droits peuvent être limités par la nécessité de protéger les droits d’autrui ou de préserver l’ordre public, la dignité nationale ou la sécurité de l’État. Le code du travail interdit la discrimination religieuse dans les syndicats et les associations professionnelles.
La loi exige que les groupes religieux s’enregistrent auprès du Ministère de l’Intérieur. En s’enregistrant, un groupe religieux obtient le statut juridique nécessaire pour recevoir des legs directs et autres dons. Une fois enregistré, le groupe peut demander une exonération fiscale chaque fois qu’il reçoit un don, y compris de l’étranger. Les groupes religieux enregistrés ont également le droit d’acquérir des terrains auprès de particuliers pour construire des lieux de culte ; toutefois, la loi stipule que les propriétaires fonciers doivent d’abord céder le terrain à l’État, après quoi l’État le transfère au groupe religieux. Pour être enregistré, un groupe doit compter au moins 100 membres et un conseil d’administration élu de neuf membres au maximum, tous citoyens.
Les groupes qui ne remplissent pas les conditions d’enregistrement peuvent s’enregistrer en tant que “simples associations”. Les associations simples ne peuvent pas recevoir de dons exonérés d’impôts mais peuvent organiser des services religieux et mener divers types de projets communautaires et sociaux. Les associations qui se livrent à des activités dangereuses ou déstabilisantes peuvent être dissoutes ou se voir retirer leur enregistrement. Les associations simples doivent demander une exonération fiscale chaque fois qu’elles reçoivent un don de l’étranger. Si une association a des dirigeants et/ou des membres du conseil d’administration étrangers, elle peut constituer une association “réputée étrangère”. Une association est réputée étrangère uniquement si le dirigeant ou les membres du conseil d’administration comprennent des ressortissants étrangers. Ces associations étrangères ne peuvent obtenir que des autorisations temporaires, soumises à un renouvellement périodique et à d’autres conditions. La loi n’interdit pas aux associations nationales d’avoir des ressortissants étrangers parmi leurs membres.
Les écoles publiques ne proposent pas d’enseignement religieux. Il n’existe aucune loi interdisant ou limitant l’enseignement religieux dans les écoles publiques ou privées.
Le gouvernement exige un permis pour toutes les manifestations publiques, y compris les événements religieux tels que les services de culte en plein air.
Le pays est parti au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques.
Pratiques du Gouvernement
Les dirigeants musulmans ont continué à affirmer que la loi sur la nationalité existante affectait la communauté musulmane de manière disproportionnée, car elle empêchait les descendants d’immigrants, dont beaucoup étaient musulmans, d’acquérir la citoyenneté, même après des générations de résidence dans le pays. Comme la religion et l’ethnicité sont souvent intimement liées, il était difficile de catégoriser la discrimination en matières de citoyenneté qui soit uniquement basée sur l’identité musulmane. Les dirigeants ont déclaré que les enfants musulmans d’origine indienne, pakistanaise et comorienne avaient le plus de difficultés à obtenir la citoyenneté. Les membres de la communauté musulmane continuent de rencontrer des difficultés dans le pays en raison de leur apatridie. Selon la loi, par exemple, seuls les citoyens malgaches peuvent posséder des terres ou des biens. En outre, ils ont rencontré des difficultés pour accéder à l’éducation, aux soins de santé et à l’emploi.
Les dirigeants du Fikambanan’ny Silamo Malagasy (Association des Musulmans Malagasy) ont continué à signaler que certains musulmans ont rencontré des difficultés pour obtenir des documents officiels, tels que la carte d’identité nationale et le passeport, et des services, auprès des bureaux de l’administration publique en raison de leurs noms à consonance non malgache. Les dirigeants ont de nouveau déclaré que les fonctionnaires harcelaient les musulmans, se moquaient d’eux et les considéraient comme des étrangers, même s’ils possédaient des cartes d’identité nationales.
Le gouvernement a continué à inclure l’Aïd al-Fitr et l’Aïd al-Adha dans la liste des jours fériés nationaux et a consulté la communauté musulmane pour fixer les dates appropriées.
En août, des nouveaux conflits sont survenus au sein de l’Eglise évangélique Jesosy Mamonjy (Jésus le Sauveur) après que les membres de l’église ont contesté les résultats de l’élection de nouveau membres du conseil d’administration le mois précédent. Les membres contestataires ont dénoncé l’interférence d’un politicien haut placé et ont affirmé qu’il avait tiré profit de son influence auprès du Ministère de l’Intérieur pour reconnaître le nouveau conseil d’administration malgré les irrégularités de l’élection. Les membres de l’église qui se sont opposé aux nouveaux dirigeants ont continué a manifester pendant les services religieux hebdomadaires, ce qui aboutit à des altercations physiques entre les membres. Le 28 août, des forces de l’ordre assignés par les autorités pour maintenir l’ordre dans l’enceinte de l’église ont arrêté quatre membres, les accusant d’atteinte à l’ordre public. Les membres du groupe opposant ont dénoncé cette action comme une arrestation arbitraire, refusant l’accusation de perturbation et accusant les forces de l’ordre d’arrêter seulement les membres s’opposant au nouveau conseil d’administration. Le tribunal a accordé une liberté aux membres arrêtés deux jours plus tard et il n’y a eu aucune autre mesure connue prise jusqu’à la fin de l’année.
Des membres du conseil d ;’administration de l’Association des Musulmans Malagasy qui ont soutenu avoir la capacité de représenter la communauté musulmane, se sont plaints qu’une interférence politique excessive a fait entrave à la résolution de leurs conflits de leadership internes qui ont débuté en 2016. Ils ont affirmé qu’une décision de justice ont validé leur conseil d’administration en 2018 et deux autres jugements en appel ont confirmé cette décision respectivement en septembre et en octobre. Toutefois, quelques membres élus du parlement et d’autres responsables haut placés, selon les membres du conseil d’administration, ont continué de soutenir d’autres membres musulmans qui ont discrédité leur leadership, causant de sérieux désaccords au sein de leur communauté en toute impunité.
Les groupes religieux ont déclaré que le gouvernement ne faisait pas toujours respecter les exigences d’enregistrement et ne refusait pas les demandes d’enregistrement. Tous les grands groupes religieux ont été enregistrés. Fin 2021, (les informations les plus récentes disponibles), le Ministère de l’Intérieur a signalé 399 groupes religieux officiellement enregistrés, contre 383 à la fin de 2020. Entre janvier et novembre, le ministère a enregistré neuf nouveaux groupes cultuels et n’a refusé aucune demande d’inscription. Le gouvernement a reconnu que certains groupes enregistrés ont pu devenir inactifs ou se dissoudre sans en informer le gouvernement.
Les chefs religieux, y compris les représentants de l’église chrétienne évangélique Vahao ny Oloko (Libérez mon peuple), ont continué à déclarer que l’application inadéquate du droit du travail par le gouvernement avait pour conséquence que certains employeurs exigeaient que leurs employés travaillent pendant les jours de culte habituels.
En juillet, un enseignant à Toamasina qui a surveillé les épreuves de l’examen officiel de fin du secondaire, a exigé à une candidate musulmane de retirer son voile pour être admise en salle d’examen. Un dirigeant de la communauté musulmane a dénoncé cet incident comme une violation de la liberté de religion. D’autres dirigeants au sein de la communauté l’a considéré comme une décision arbitraire prise par un fonctionnaire, étant donné que la loi n’interdit pas les atours religieux pendant les examens officiels.
La télévision nationale malgache, gérée par l’État, a continué à diffuser gratuitement des émissions pour les adventistes du septième jour, les catholiques, les luthériens, les anglicans et les presbytériens le week-end, et pour la communauté musulmane le vendredi. Pendant le Ramadan, elle a fourni un temps de diffusion supplémentaire à la communauté musulmane. Les membres de la Fédération des Eglises Evangéliques ont reçu du temps d’antenne gratuit pour diffuser des services religieux tous les matins sur la radio et la télévision publiques.
Des représentants de la communauté musulmane et d’églises évangéliques chrétiennes ont affirmé que le gouvernement a accordé un traitement de faveur envers les plus grandes églises chrétiennes. La communauté des églises évangéliques a affirmé tandis que le Président ou d’autres responsables haut placés du gouvernement ont régulièrement assisté les événements organisés par les plus grandes églises chrétiennes, ils n’étaient jamais présents aux événements organisés par les églises évangéliques. Ils ont également déclaré n’avoir jamais reçu de dons de l’Etat tandis que les plus grandes églises chrétiennes ont bénéficié de dons du gouvernement. Les dirigeants musulmans dans certaines régions ont annoncé que les autorités ne les ont jamais invités aux événements œcuméniques périodiques organisés par les chefs de régions.
Section III. Statut de respect de la société pour la liberté de religion
Les dirigeants de l’Association des Musulmans Malagasy ont continué à dire que certains membres du public les associaient aux islamistes et aux extrémistes. D’autres responsables musulmans ont toutefois fait état de relations généralement bonnes entre les membres de leur communauté et les autres confessions dans le pays.
Les membres de certaines églises protestantes évangéliques, en particulier ceux qui célèbrent leur sabbat le samedi, ont à nouveau déclaré que l’accès à l’emploi leur était parfois refusé et qu’ils pensaient que cela était dû à leur affiliation religieuse. Ils ont aussi rapporté que les enfants de certains de leurs membres ont parfois subi des moqueries ou des brimades de leurs camarades de classe à cause de leur affiliation religieuse.
Au cours de l’année, des responsables d’églises évangéliques ont déclaré que certaines femmes membres de leurs églises étaient victimes de violences commises par leurs maris parce qu’ils n’étaient pas d’accord avec leurs croyances religieuses. Ils ont aussi déclaré que des nouveaux convertis de leur églises ont subir des harcèlements psychologiques de la part de leurs proches ou amis à cause de leur affiliation religieuse. Des dirigeants d’églises évangéliques ont rapporté des cas isolés de désaccords avec les riverains de leurs lieux de culte dans les zones rurales mais ils ont indiqué que ces problèmes ont été généralement résolus sans recours à la loi. Les dirigeants de certains groupes évangéliques ont rapporté avoir été décrits dans des articles de journaux sévères et des publications sur les réseaux sociaux comme étant cupides et financièrement malhonnêtes. Ils pensaient que les auteurs de ces articles avaient l’intention d’inciter la haine et la discrimination à leur encontre et contre leurs communauté religieuses.
Des représentants des églises chrétiennes à Manakara ont accusé les membres de la communauté musulmane d’inciter leurs adhérents à se convertir à l’islam. Ils ont accusé les dirigeants musulmans de tirer profit de la dégradation de la situation socio-économique qui affecte la population locale à cause des catastrophes naturelles récentes. Les églises chrétiennes ont déclaré que la communauté musulmane a offert des repas gratuits, un accès gratuit à l’école, et des dons de fournitures scolaires pour attirer de nouveaux convertis.
Section IV. Politique et engagement du Gouvernement Américain
Les représentants de l’ambassade ont rencontré périodiquement les responsables du Ministère de l’Intérieur pour discuter des états d’enregistrement des groupes cultuels.
Les représentants de l’ambassade ont eu des échanges réguliers avec les chefs religieux pour discuter de la liberté de religion aussi bien que de la restriction de l’expression religieuses affectant les communautés religieuses. Les responsables de l’ambassade ont également rencontré des groupes de défense des droits de l’homme et des organisations internationales, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, au sujet de la liberté religieuse et de l’apatridie.
En début octobre, les employés de l’ambassade ont rencontré des chefs religieux de différentes confessions pendant leurs visites sur terrain dans la région sud-ouest de Toliara et ont rencontré un autre groupe à Manakara dans le sud est en décembre. Pendant ces rencontres, les chefs religieux ont unanimement fait état d’une bonne cohabitation inter religieuse dans leurs régions mais ont aussi indiqué que les autorités ont fait preuve de traitement de faveur envers certaines dénominations religieuses.